Le 31 mars 2021
Point de presse spécial en ligne
Le secrétaire d’État Antony Blinken et les anciens participants à YALI
« 10 questions avec Tony »
Mme Kenewendo : Bien le bonjour, Monsieur le secrétaire. Nous sommes très heureux d’être avec vous cet après-midi, et je me trouve en compagnie de plusieurs anciens de YALI, c’est-à-dire de l’Initiative pour les jeunes leaders africains. Et ils ont tous hâte de discuter avec vous de la meilleure façon de renforcer les relations entre les États-Unis et l’Afrique et de faire en sorte que nous, jeunes africains et anciens de YALI, puissions continuer à dialoguer avec vous afin de consolider ces relations. Et encore une fois c’est un grand plaisir, en tant qu’anciens, de rencontrer le secrétaire d’État, M. Antony « Tony » Blinken, afin de dialoguer plus avant, et nous appelons l’événement d’aujourd’hui « 10 questions avec Tony » en l’honneur du 10e anniversaire de YALI. Nous sommes très impatients de vous écouter, Monsieur le secrétaire, et nous attendons avec intérêt toutes les questions des anciens participants au programme. Alors, encore une fois, je vous souhaite très chaleureusement la bienvenue, Monsieur le secrétaire.
Monsieur le secrétaire Blinken : Eh bien, bonjour. Merci beaucoup pour cet accueil chaleureux, et c’est merveilleux de célébrer le 10ème anniversaire. Je suppose que si c’était le 20ème anniversaire, ce serait « 20 questions », mais nous commencerons par 10 cette fois et j’aurai peut-être la chance de revenir dans dix ans. Mais j’ai eu l’occasion d’apprendre à bien connaître le programme YALI lorsque j’ai occupé le poste de secrétaire d’État adjoint sous le président Obama et que mon épouse, Evan Ryan, dirigeait le Mandela Washington Fellowship, entre autres. Elle était secrétaire d’État adjointe aux affaires éducatives et culturelles, responsable de tous nos programmes d’échange, et c’était exactement au cœur de ses fonctions. En somme, donc, notre famille est composée de fans de cette initiative.
Mais même pour quelqu’un comme moi qui connaît au moins un peu YALI, je dois vous dire qu’il est remarquable de voir son impact après dix ans : plus de 24 000 anciens participants entre le programme Mandela et les centres de leadership régionaux. Bien que le programme se soit développé, l’idée de base est la même qu’au début. Sur un continent de 1,3 milliard d’habitants, dont l’âge médian est de 19 ans, la meilleure façon d’élargir les opportunités, de faire croître les économies et de promouvoir les droits de l’homme est d’investir dans les jeunes leaders africains. C’est ce qui fait la force de ce concept.
Le travail que vous faites tous en témoigne, y compris pendant la pandémie de COVID-19. C’est pour cela malheureusement que nous nous réunissons virtuellement aujourd’hui, mais je me réjouis à la perspective d’avoir l’occasion de vous rencontrer en personne.
La pandémie a mis en évidence trois points qui, à mon avis, sont au cœur des raisons pour lesquelles ce programme est si important. Le premier, c’est que les communautés les plus durement touchées par la pandémie sont celles qui étaient déjà mal desservies et marginalisées. C’est le cas ici en Amérique et c’est vrai dans vos pays. Que vous travailliez au service de la santé des adolescentes au Ghana comme le fait Maxwell, pour l’autonomisation des femmes et des filles en République démocratique du Congo comme le fait Passy, à l’élargissement des opportunités pour les enfants dans les campements informels du Kenya comme le fait Billian, vous avez vu cet impact inégal et bouleversant de près.
Le deuxième point, c’est que la meilleure façon de préparer les collectivités à des défis massifs comme la pandémie, c’est de renforcer la résilience, d’élargir les opportunités, de donner plus de poids aux voix locales des leaders émergents avant que la crise ne frappe, et de veiller à ce que les innovations technologiques et d’autres outils vitaux répondent aux besoins de ces mêmes collectivités, et pas seulement à ceux des personnes aisées et qui ont des relations bien placées.
Les anciens de YALI sont à l’avant-garde de ce travail. Des gens comme Mary Mwangi, qui a mis au point une application permettant aux passagers de tuk-tuk de réserver un trajet et de payer en ligne à l’avance afin d’éviter les files d’attente et de devoir échanger de l’argent de la main à la main, une façon d’éliminer ainsi les principaux vecteurs de la propagation du virus. Des anciens du programme comme Moussa Kondo, dont l’ONG Accountability Lab au Mali lutte contre la désinformation avec des diffusions quotidiennes de messages qui démystifient les mythes populaires sur le virus.
Et cela m’amène à mon dernier point. La pandémie a montré clairement à quel point nos destins sont vraiment indissociables. Que ce soit pour lutter contre la COVID-19, faire face à la crise climatique, construire une économie mondiale durable et inclusive ou relever l’un des autres défis auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui, nous sommes tous dans le même bateau. Ainsi, le besoin de leaders de YALI n’a jamais été aussi urgent, et c’est pourquoi j’ai vraiment hâte de vous entendre tous et en particulier de savoir comment nous pouvons encore consolider ce programme.
À cette fin, permettez-moi de donner le coup d’envoi en posant la première question. Je vais répondre à quelques questions, mais je voulais pouvoir poser la première. Et ma première question est la suivante : maintenant que YALI entre dans sa deuxième décennie, qu’est-ce que l’Amérique peut faire de plus pour autonomiser la génération montante de dirigeants africains ? Comment le programme doit-il évoluer pour relever les défis et saisir les opportunités que vous voyez tous aujourd’hui ?
Alors pourquoi ne pas commencer par ça, et je vous rends la parole, Bogolo.
Mme Kenewendo : Très bien. Merci beaucoup, Monsieur le secrétaire, et merci de votre accueil chaleureux. Il est tout à fait judicieux que vous lanciez la séance de questions car nous en avons beaucoup et tout le monde a vraiment envie de vous les poser. Mais permettez-moi de demander à un de mes collègues, M. Maxwell au Ghana, de répondre à cette première question. Maxwell ?
- Kumbeni : D’accord. Merci beaucoup, Monsieur le secrétaire, pour cette question qui donne beaucoup matière à réflexion.Je m’appelle Maxwell Kumbeni.Je fais partie de la promotion Mandela Washington de 2018.J’ai étudié l’administration publique à l’Université du Wisconsin à Madison, après quoi je suis allé au département de la santé de Cincinnati pour faire mes six semaines d’expérience professionnelle.
Maintenant, pour répondre à la question, je pense que YALI est la meilleure chose qui soit arrivée à cette génération de jeunes en Afrique. C’est incroyable si l’on pense à l’autonomisation économique considérable et aux grands leaders qui ont émergé de ce programme en seulement 10 ans, et les perspectives sont encore plus impressionnantes quand on y pense.
Et donc pour moi, je pense que la meilleure ou la première étape pour aider au mieux cette prochaine génération de participants YALI passe par la garantie de la pérennité des trois branches du programme YALI par le gouvernement des États-Unis – c’est-à-dire le Mandela Washington Fellowship, YALI Online, et les centres régionaux de formation en leadership. Nous pourrions ainsi continuer d’avoir accès aux relations et aux ressources avec lesquelles bâtir nos entreprises, puis nos collectivités.
Deuxièmement, bien qu’il y ait un certain niveau d’intégration entre les trois volets des programmes YALI, ce lien ou cette cohésion solide ne semble pas exister. Il est donc nécessaire de créer des programmes qui garantiront que ces différentes branches travaillent ensemble pour veiller à la cohésion et à ce que l’unité conduise à des accomplissements supplémentaires.
Et puis je pense aussi que si le nombre de places pour l’expérience de développement professionnel était porté à au moins 25 % des participants qui sont recrutés au cours d’une année, cela contribuerait grandement à inspirer plus de gens. C’est parce que ce programme expose en fait les participants au véritable environnement de travail des États-Unis et qu’il nous donne les compétences nécessaires pour démarrer nos propres entreprises, ou mieux encore, pour développer des entreprises qui existaient déjà avant que nous ne participions au programme. Quant à l’avenir de YALI, je pense que si le financement peut être garanti pour les vingt prochaines années, YALI finira par devenir le plus grand organe économique et décisionnel du continent africain et peut-être au-delà. Il y aura des membres de YALI à la tête de la plupart des organisations, et ils seront les décideurs critiques sur ce continent, et je pense que si on y réfléchit, YALI pourrait devenir une force économique et un décideur politique sur le continent et peut-être au-delà.
Merci, Monsieur le secrétaire.
Monsieur le secrétaire Blinken : Merci. C’est une réponse très judicieuse et intelligente, et j’ai de très bonnes idées rien qu’en entendant cela. Je vous en remercie vraiment.
Mme Kenewendo : D’accord. Merci beaucoup, Maxwell. Merci beaucoup, Monsieur le secrétaire. J’aimerais juste ajouter aussi que nous avons organisé d’excellentes réunions et que nous avons renforcé nos réseaux.
Monsieur le secrétaire Blinken : Oui.
Mme Kenewendo : Et j’attends avec impatience que les réunions reprennent parce qu’elles nous aident vraiment à progresser sur le continent entre nous.
Et maintenant, je suis sûre que les questions brûlantes sont déjà proches de 100 degrés, et je veux passer, Monsieur le secrétaire, à toutes les questions, à commencer par Yared en Éthiopie. Yared, êtes-vous prêt à poser votre question ?
- Abera : Oui. Merci, monsieur le Secrétaire. Je m’appelle Yared Abera. Je suis un ancien élève du Centre régional de leadership de Nairobi en 2017, où j’ai participé au programme d’engagement civique.
La question que j’aimerais vous poser, Monsieur le secrétaire Blinken, est la suivante : les problèmes comme le changement climatique exigent une coopération mondiale urgente. Maintenant que l’Amérique est de retour sur la scène mondiale, à quoi devons-nous nous attendre pour ce qui est de relever les défis majeurs et croissants du changement climatique, au-delà de la réintégration des États-Unis au sein de l’Accord de Paris ?
Monsieur le secrétaire Blinken :Merci beaucoup, Yared. C’est peut-être l’une des questions les plus cruciales, voire la plus cruciale de notre époque, car le changement climatique est un défi existentiel pour nous tous. Et pour en venir à votre propos, le président a immédiatement réintégré l’Accord de Paris. Il a nommé l’un de mes plus illustres prédécesseurs, John Kerry, à la tête de nos initiatives internationales en matière de changement climatique. Et comme vous le savez, nous avons convoqué un sommet sur le climat à Washington, un événement important sur la voie de Glasgow et de la COP 26 à la fin de l’année. Et cette année sera décisive pour rehausser les ambitions des pays du monde entier face au changement climatique, pour fixer des objectifs encore plus ambitieux, explorer les modalités de leur financement, transformer le défi du changement climatique en une opportunité d’innovation technologique verte et de création de nouveaux emplois bien rémunérés. Et je pense que le point de départ de tout cela a vraiment été cette réunion du 22 avril, à l’occasion de la Journée de la Terre, que le président Biden a organisée, et nous en faisons vraiment un point de départ pour veiller à ce que la COP 26 à Glasgow à la fin de l’année soit un grand succès.
La dernière chose que je dirai à ce sujet, c’est qu’il s’agit vraiment d’une année charnière dans une décennie charnière. Les décisions que les pays prennent et les actions qu’ils entreprennent maintenant et d’ici 2030 vont vraiment déterminer si nous réussirons ou non à atteindre les objectifs ambitieux que beaucoup d’entre nous se sont fixés pour 2050. Nous ne pouvons pas attendre les années 2040 pour commencer à agir. Cela doit se produire maintenant, et tout ce qui va se passer cette année nous permettra, espérons-le, de prendre ce départ très, très important.
Bogolo, à vous.
Mme Kenewendo : D’accord. Merci. Merci, Monsieur le secrétaire. Merci, Yared.
Notre question suivante, Monsieur le secrétaire, nous vient d’Afrique du Sud, de Melene. Melene, vous pouvez —
Mme Rossouw : Merci beaucoup, Bogolo. Oui, madame. Merci Monsieur le secrétaire Blinken. Je m’appelle Melene Rossouw et je suis de la promotion 2019 du programme Mandela Washington. J’ai suivi le programme en engagement civique avec le Presidential Precinct à l’Université de Virginie.
Voici ma question pour vous, Monsieur : l’inégalité entre les sexes est l’une des plus grandes menaces qui pèsent sur l’avenir de l’Afrique. Refuser à 52 % de la population africaine un droit à la pleine participation et à l’égalité des chances a un impact sur la démocratie, la sécurité, la gouvernance, les droits de l’homme et l’économie. Quelles mesures le gouvernement des États-Unis entend-il prendre pour promouvoir non seulement l’égalité des sexes aux États-Unis, mais aussi en Afrique où l’on observe les inégalités les plus importantes au monde ? Merci.
Monsieur le secrétaire Blinken :Merci pour une question très, très importante. Et je dois vous dire d’emblée que l’administration Biden-Harris considère l’équité et l’égalité des sexes non seulement comme un impératif moral et des droits de l’homme, mais aussi comme un impératif stratégique car il est vital pour réduire la pauvreté, promouvoir la croissance économique et consolider la démocratie. Le 8 mars, Journée internationale de la femme, vous avez peut-être pris note du fait que le président Biden a publié un décret présidentiel concernant la création à la Maison Blanche d’un Conseil sur la politique relative au genre. C’est en soi un signal fort de son engagement, et de notre engagement, à redynamiser notre travail en faveur de l’égalité des sexes non seulement aux États-Unis, mais, comme vous le dites, à l’échelle mondiale. Le travail du Conseil est de faire progresser l’égalité des sexes par le biais des actions du gouvernement américain, de toutes ses agences et départements, et au niveau international, il entend faire progresser l’égalité des sexes par le biais de notre action diplomatique – et j’y travaille chaque jour –, par le biais du développement et du travail de nos agences pour le développement comme l’USAID, par le biais du commerce et même de la défense.
Nous comprenons que le leadership des femmes est essentiel à la paix et à la prospérité durables dans toute l’Afrique subsaharienne. Dès lors, notre soutien à l’égalité des sexes concerne vraiment tout le continent, et nous déployons pour cela des efforts diplomatiques visant à réduire les barrières à la participation des femmes à la vie économique et politique, notamment en nous attaquant aux obstacles juridiques, réglementaires et culturels au progrès des femmes.
Nous avons un bureau ici au département d’État que vous connaissez probablement, je pense. Il s’agit du Bureau chargé des questions relatives aux femmes dans le monde, une initiative très importante par laquelle nous œuvrons activement en faveur de l’autonomisation économique des femmes. Nous avons des programmes dans 25 pays d’Afrique subsaharienne. Et sur tout le continent, je pense qu’il est largement admis que les femmes et les experts dans leurs domaines respectifs sont vraiment les piliers des économies africaines à bien des égards, et la croissance économique, qui est si vitale pour tout le monde, la croissance qu’ils génèrent conduit à une sécurité, une stabilité, une prospérité plus importante à long terme aussi bien dans leurs collectivités que dans les pays en général.
Vous le savez très bien : les femmes et les filles sont souvent exclues du processus décisionnel, et c’est en soi l’un des obstacles les plus importants, à mon avis, que nous devons nous employer à éliminer dans le cadre de nos programmes bilatéraux avec les pays, mais aussi au niveau multilatéral par l’intermédiaire de différentes organisations. Nous travaillons pour promouvoir une participation totale, efficace et significative à l’atténuation des conflits, aux efforts de consolidation de la paix, à la sécurité et au maintien de l’ordre, à tous les niveaux politiques et de gouvernance.
Et enfin, cela doit s’accompagner d’une responsabilité, car il est important que les gouvernements assument la responsabilité des violations des droits de l’homme. Fondamentalement, nous devons mettre fin à l’impunité des responsables de tels actes en ligne, hors ligne, pour lutter contre la violence sexiste – ce que le président Biden à tout particulièrement à cœur. Vous savez peut-être que l’une des choses dont il est le plus fier dans sa carrière de sénateur, il y a de nombreuses années, c’est la loi sur la violence contre les femmes, ici aux États-Unis. Et je pense que si vous lui demandiez de quoi il est le plus fier, de tous ses accomplissements, c’est probablement celui-là. Et il a également travaillé pour donner à cette action une dimension internationale et pour la renforcer dans le monde entier, et cela englobe tout, la violence sexiste, qu’il s’agisse des mutilations génitales, du mariage précoce et forcé, de violences dans le cadre de conflits, de viols, d’autres formes de violence contre les femmes. Tout cela s’inscrit dans le cadre de notre politique. Et je suis désolé de m’étendre sur cette question, mais c’est vraiment important.
Nous avons également des initiatives en faveur des femmes, de la paix et de la sécurité en cours de mise en œuvre dans plus de 11 pays d’Afrique subsaharienne. Nous avons des programmes d’assistance qui visent à faire progresser les femmes, la paix et des actions dans le domaine de la sécurité. Ils permettent d’aider les femmes leaders locales et de prévenir et de combattre l’extrémisme violent, de renforcer les efforts centrés sur les survivants en vue de prévenir la violence sexiste et d’y répondre, et de faire progresser le leadership des femmes dans la prise de décisions – je le répète, c’est tellement important – dans le cadre des efforts de paix et de sécurité. Nous avons constaté que lorsque les femmes participent réellement à la prise de décisions, on prend de meilleures décisions. C’est aussi simple que ça.
C’est donc quelque chose dont nous sommes très fiers, mais que nous entendons résolument aussi développer dans les années à venir, et je pense que vous mettez en évidence l’impact du programme YALI par votre propre engagement en faveur de l’autonomisation des femmes. Bravo à vous, et nous avons vraiment hâte de continuer à travailler ensemble sur ce sujet.
Bogolo, à vous.
Mme Kenewendo : Merci beaucoup, Monsieur le secrétaire, et merci, Melene, d’avoir posé cette question. Votre réponse était très détaillée et je l’apprécie particulièrement car je pense que si nous ne donnons pas des moyens d’action aux femmes, nous n’obtiendrons que 50 % de réussite et de productivité.
Monsieur le secrétaire Blinken : Oui.
Mme Kenewendo : Vous l’avez vraiment très bien exprimé. Merci.
Pour notre prochaine question, nous avons Passy, de la République démocratique du Congo. Passy, c’est à vous de poser une question.
Mme Mubalama : Merci, Monsieur le secrétaire d’État, de m’avoir donné l’occasion et accordé le privilège de participer à cette réunion aujourd’hui. Je m’appelle Passy Mubalama. Je suis une militante en faveur de la démocratie et des droits de l’homme basée à Goma, en République démocratique du Congo. J’ai participé à YALI en 2014 dans le cadre du programme de leadership civique de l’Université du Delaware.
La RDC est un pays très riche en ressources. Comment les États-Unis peuvent-ils contribuer à garantir un partenariat économique plus équitable et à lutter contre la corruption si les entreprises internationales veulent tirer parti des ressources du Congo au niveau interne et externe ? Merci.
Monsieur le secrétaire Blinken :Merci beaucoup, Passy. Et d’abord, je ne suis pas sûr, mais il est possible que nous nous soyons rencontrés parce que lorsque j’étais au gouvernement avant, je suis allé rendre visite aux participants à YALI, à l’Université du Delaware. Je me demande…. je ne me souviens pas si c’était en 2015 ou 2016. Mais –
Mme Mubalama : Oui, oui, 2014. Je pense que nous nous sommes rencontrés à l’Université du Delaware. C’est donc un plaisir de vous revoir.
Monsieur le secrétaire Blinken :Oui, c’est vrai, je suis donc ravi de vous revoir, même de très loin.
Mme Mubalama : Oui, merci.
Monsieur le secrétaire Blinken :Permettez-moi juste de dire, en réponse à votre question, que les ressources naturelles de la RDC sont d’une importance vitale non seulement pour la RDC mais aussi pour le monde, et nous avons une équipe à l’ambassade à Kinshasa qui s’emploie à faire quelque chose de très important,c’est-à-dire dénoncer les réseaux corrompus opérant en RDC, ce qui est, je pense, l’un des obstacles et des défis les plus importants à l’exploitation appropriée de ces ressources, par opposition à leur exploitation inappropriée.
Nous travaillons aussi pour accroître les liens commerciaux et d’investissement, notamment grâce au rétablissement de l’éligibilité de la RDC dans le cadre de la loi américaine sur la croissance et les possibilités économiques en Afrique. Il s’agit d’un programme de préférences commerciales très important qui, à mon avis, peut vraiment changer la donne, en particulier avec le renouvellement de l’éligibilité de la RDC.
À mon avis, il est également très important de se concentrer sur les efforts que déploie actuellement la RDC pour instaurer un climat plus favorable aux affaires. C’est vraiment essentiel pour attirer les investisseurs, susciter leur intérêt, gagner leur confiance. Et il est également extrêmement important que lorsque les personnes, les entreprises investissent, elles le fassent sans oublier de respecter les normes les plus strictes, et c’est quelque chose à quoi nous tenons beaucoup.
Exposer les acteurs corrompus qui essaient en fait d’exploiter cela à mauvais escient et encourager le commerce légitime – ce sont les deux piliers sur lesquels nous travaillons. Et je pense que nous assisterons à un réel changement dans nos relations avec la RDC, et à de réels progrès. C’est donc mon espoir et nous y travaillons certainement. Merci de cette bonne question.
Et Bogolo, à vous.
Mme Kenewendo : D’accord. Merci, Monsieur le secrétaire, et excellente question, Passy.
Et maintenant, je vais passer au Kenya et nous allons répondre à une question que Billian va nous poser.
- Ojiwa : Merci, Monsieur le secrétaire. Bonjour. Je m’appelle Billian Okoth Ojiwa. Je suis un ancien participant du programme Mandela Washington 2018. J’ai étudié le leadership civique à l’Université du Delaware.
Ma question est la suivante : comment pouvons-nous donner envie aux jeunes d’aujourd’hui de surmonter leur acceptation du statu quo et de devenir les leaders de demain ? Et comment les États-Unis et le Kenya peuvent-ils continuer de s’associer pour donner aux jeunes et aux jeunes leaders les compétences et les ressources dont ils ont besoin pour susciter le changement qu’ils souhaitent voir dans le monde ?
Monsieur le secrétaire Blinken : Eh bien, pour commencer, c’est ce que vous faites. Vous et vos collègues du programme YALI le faites, et c’est une source d’inspiration incroyable. Vous donnez ainsi un exemple incroyablement puissant à vos amis, vos collègues, vos communautés, et cela va avoir des effets d’entraînement que je ne pense pas que vous puissiez même pleinement apprécier. Il y a des gens encore plus jeunes aujourd’hui, inspirés par ce que vous faites et ce que vous avez fait, et ils peuvent voir une voie différente à la suite de cela. Et cela, je pense, encouragera les gens à se mobiliser, à s’exprimer, à s’engager et à essayer d’aller au-delà du statu quo.
Mais bon, nous savons que pour se sentir vraiment mobilisés et être vraiment inspirés, les gens ont besoin de se sentir entendus – parce que parler dans le vide peut être un exercice extrêmement frustrant. Je pense donc que les jeunes voix sont essentielles à tout discours politique, par exemple sur les réformes électorales et constitutionnelles. Et c’est certainement vrai à l’approche des élections de 2022 au Kenya.
Nous soutenons toute une gamme de programmes pour essayer de renforcer la capacité des organisations de jeunesse à se rassembler de manière constructive afin d’aider les jeunes à être plus résilients face à la manipulation politique et à la violence, à plaider pour une gouvernance plus inclusive et une responsabilisation accrue. Et la famille YALI, en particulier les anciens du programme de l’engagement civique comme vous, je pense encore une fois que vous jouez un rôle vraiment important dans ce domaine. Et l’inspiration dont vous êtes la source est, plus que toute autre chose, notre atout le plus solide.
Et je voudrais ajouter une autre chose. Cela fait un bon moment que je fais ce genre de travail, et je sais que malgré tous les efforts que je pourrais faire et que mes collègues font pour avoir un esprit ouvert et de nouvelles perspectives, plus on vieillit, plus c’est difficile. Chacun s’installe un peu dans sa façon d’être, de penser. Et ce qui est le plus important, c’est que nous entendions et écoutions de nouvelles voix, des voix jeunes, de nouvelles perspectives, de nouvelles idées. Personne n’a le monopole des idées, encore moins des bonnes idées. Et au fur et à mesure que vous apportez ces idées sur le marché des idées, cela va créer un marché beaucoup plus dynamique et abondant, et je pense que c’est comme cela que l’on progresse.
Nous devons avoir les oreilles et l’esprit ouverts, et vous devez vous impliquer, et je suis si heureux que vous le fassiez et que vous montriez vraiment l’exemple.
Bogolo, à vous.
Mme Kenewendo : Merci, Monsieur le secrétaire. Une ancienne participante ici, c’est pour ouvrir les oreilles, les esprits, et pour aller de l’avant.
Monsieur le secrétaire, notre question suivante nous viendra de Pedro, à Cabo Verde. Pedro ?
- Lopes : Bonjour, Monsieur le secrétaire d’État. Merci pour cette formidable opportunité. Bonjour également à la famille YALI. Vous me manquez, frères et sœurs. C’est fantastique que nous ayons eu cette occasion de parler et aussi de donner une tribune à des gens comme mon amie Melene, une brillante avocate, et aussi comme Mme Bogolo. Je m’appelle Pedro Lopes. Je suis un ancien participant du programme d’entrepreneuriat commercial Mandela Washington 2017 à l’Université du Nouveau-Mexique.
L’infox. Les fausses nouvelles partagées sur les plateformes sociales contribuent à l’érosion de la démocratie en désinformant et en polarisant le public. Comment protéger les petits États démocratiques comme Cabo Verde, mon pays, de ce danger ? Devrait-il y avoir une réglementation mondiale des réseaux sociaux, Monsieur le secrétaire d’État ? Merci beaucoup pour cette opportunité.
Monsieur le secrétaire Blinken : C’est l’une des questions les plus importantes de notre temps. Et comme vous le dites à juste titre, nous avons un énorme défi à relever avec la désinformation et l’infox, en particulier sur les plateformes de réseaux sociaux, et c’est une menace pour les démocraties, et pas seulement pour votre pays et pas seulement pour d’autres pays – pour les États-Unis et pour beaucoup d’autres démocraties dans le monde. Et nous en avons fait l’expérience. Nous continuons d’en faire l’expérience tous les jours. Et à ce sujet, il importe de souligner quelques points.
Les plates-formes de médias sociaux elles-mêmes ont évidemment un rôle et une responsabilité énormes dans la lutte contre les informations mensongères, et leur capacité à les combattre, et à les combattre efficacement, est l’un des aspects les plus importants de la question. Et c’est un euphémisme de dire que c’est au mieux un travail inachevé, mais il est d’une importance vitale qu’elles se mobilisent et assument un rôle de chef de file. Et bien sûr, concilier la lutte contre la désinformation et l’infox d’une part, et la préservation de la liberté d’expression de l’autre, est l’un des défis les plus fondamentaux de notre époque. Cela soulève des questions particulièrement épineuses et des questions vraiment philosophiques ainsi que des questions pratiques. Parce que la libre circulation de l’information est essentielle à la démocratie, et ce n’en est pas moins vrai à l’ère du numérique, mais cela montre également que chacun a un rôle à jouer dans la lutte contre la désinformation.
Beaucoup d’entre nous qui ont été élevés dans des traditions libérales et qui étudient cela pensaient, il me semble, peut-être naïvement que… nous parlions du marché des idées. John Stuart Mill, si vous revenez à certains des premiers théoriciens en sciences sociales, partait du principe qu’il suffisait d’exprimer des idées et que les meilleures s’imposeraient, que la vérité prévaudrait. Mais bien sûr, nous avons constaté que ce n’est pas aussi simple que cela.
Le département d’État dispose de nombreuses ressources qui peuvent vous aider à formuler une stratégie de lutte contre les fausses informations, y compris à Cabo Verde. Je vous encouragerai donc, par exemple, à vous mobiliser, à travailler avec notre équipe de l’ambassade des États-Unis à Praia et à essayer de tirer parti de ces ressources et de ces programmes. C’est une façon très pratique d’avancer et qui peut être utile. Mais c’est quelque chose à quoi nous allons devoir faire face ensemble pendant longtemps.
Bogolo ?
Mme Kenewendo : D’accord. Merci beaucoup pour cette réponse, Monsieur le secrétaire.
Notre question suivante nous vient du Zimbabwe et de Mantate. Mantate ?
Mme Mlotshwa : Oui. Merci beaucoup, Bogolo. Je m’appelle Mantate Mlotshwa, et c’est un plaisir de vous rencontrer, Monsieur le secrétaire. Je viens du Zimbabwe et je suis de la promotion 2018 du centre de leadership régional en Afrique du Sud, où j’ai suivi le cursus de leadership civique.
Donc, comme je suis très passionnée par la démocratie et la gouvernance, je vois qu’il y a beaucoup de violence dans des pays comme le Zimbabwe où ils [inaudible] et attaquent les dirigeants de l’opposition et de la société civile – les insurrections au Mozambique, par exemple, et le conflit ethnique en Éthiopie.
Ma question porte donc sur la position, la position politique des États-Unis en matière de violence non résolue, passée et présente.
Monsieur le secrétaire Blinken : Nous devons donc prêter attention, et nous prêtons attention, aux problèmes de sécurité ainsi qu’à la démocratie et aux droits de l’homme. Et malheureusement, ce que nous avons vu, c’est un recul sur les deux fronts dans un certain nombre d’endroits dans toute l’Afrique, et je dois dire que nous sommes préoccupés par ces tendances – à la fois une insécurité croissante et une tendance au déclin de l’adhésion aux normes démocratiques et aux droits de l’homme.
En fin de compte, des démocraties inclusives et accessibles sont les facteurs les plus vitaux pour éloigner les pays des cycles de violence et les mettre sur la voie de la paix, de la stabilité et du développement. Ce que nous avons découvert par l’expérience et ce que l’histoire suggère, c’est que les pays qui jouissent d’une gouvernance transparente et responsable et qui offrent des services à leur population font face à moins de troubles sociaux et font en sorte que le public s’investisse réellement dans la construction d’un avenir plus fort, car la population peut le voir. Elle peut le sentir.
Donc, si la gouvernance, si la gouvernance démocratique peut fournir efficacement ce dont les gens ont besoin et leur donner une voix dans le système, c’est en fin de compte comme cela que l’on peut gérer la violence : on veille à la prévention de son explosion en premier lieu, et on consolide la démocratie et les droits de l’homme. Nous sommes donc fermement résolus à travailler avec des partenaires au service de la paix et de la sécurité en Afrique. À court terme, cela ressemble parfois à des partenariats pour la sécurité, à une facilitation de l’atténuation des conflits et à des actions diplomatiques de sensibilisation aux droits de l’homme. En fin de compte, je pense que la chose la plus importante que nous puissions faire est d’aider les pays, dans la mesure du possible, à consolider leurs institutions démocratiques, à renforcer la capacité à faire en sorte que les citoyens bénéficient du progrès – de la croissance économique – et c’est la véritable base que nous devons mettre en place. Mais cela prend du temps. Et en attendant, le plus important, ce sont certains de ces programmes et partenariats pour faire face aux défis immédiats.
Bogolo ?
Mme Kenewendo :D’accord.Merci, Monsieur le secrétaire.Merci, Mantate, pour cette question.Elle est particulièrement opportune parce que, cette semaine, la troïka de la SADC se réunit également sur les problèmes au Mozambique et nous sommes tous concernés.Je veux dire, c’est encourageant d’entendre une jeune personne poser cette question, Monsieur le secrétaire, car cela montre que les jeunes sont conscients que toute instabilité ferme également la porte à de nouvelles opportunités de croissance pour nous à l’avenir.
Monsieur le secrétaire Blinken : Oui.
Mme Kenewendo : Merci donc pour cette réponse également.
Donc, pour notre question suivante, nous aller passer à Jamila, de l’Ouganda. Jamila ?
Mme Mayanja : Oui, merci, Bogolo. Bonjour, Monsieur le secrétaire. Je suis ravie de vous rencontrer virtuellement. Je m’appelle Jamila Mayanja de la promotion Mandela Washington de 2015. J’ai suivi le programme commerce et entrepreneuriat au Dartmouth College.
Ma question est la suivante : les programmes d’échange comme YALI ont-ils été bénéfiques pour le gouvernement américain, comme ils l’ont été pour les participants à titre individuel ?
Monsieur le secrétaire Blinken : Eh bien, le fait est, et ce n’est pas connu, que nous tirons encore plus de profit de ces programmes que vous, les participants. Je crois vraiment cela, profondément. J’y ai beaucoup réfléchi au fil des années. Et c’est une chose incroyable parce que si vous revenez sur plus de 75 ans de programmes d’échange – et YALI est peut-être l’un des plus beaux exemples, mais nous avons beaucoup d’autres programmes d’échange d’un type ou d’un autre : des programmes académiques, commerciaux, axés sur les compétences, ou simplement des programmes de visite.
Par exemple, pendant de nombreuses années, nous avons pu identifier au sein de chaque génération les talents émergents et remarquables de différents pays et leur permettre de participer à l’un de nos programmes. Et après avoir parlé à des anciens des programmes, que ce soit YALI ou tout autre, qui ont pu passer du temps aux États-Unis et voir vraiment de leurs propres yeux ce qu’est notre pays – ses bons et ses moins bons côtés – mais cela de première main et rencontrer, établir des liens, développer des relations avec des Américains, 9 fois sur 10, j’ai constaté que les participants en repartaient avec un fort sentiment d’attachement aux États-Unis, des relations qui durent des années, voire des décennies. Et puis ce qui est extraordinaire, et vous en êtes tous de parfaits exemples – ces jeunes que nous avons identifiés pour venir participer à des programmes accèdent invariablement à des postes de responsabilité incroyable, de direction, d’innovation dans leur pays d’origine dans les secteurs de la gouvernance, de l’éducation, de la science, dans les arts, dans les affaires, et j’en passe.
Les statistiques que j’ai consultées datent de plusieurs années, elles ne sont donc pas à jour. Mais à l’époque, il y a environ cinq ou six ans, lorsque j’ai étudié cette question pour la dernière fois, parmi tous les participants à nos programmes d’échange au fil des ans, plus de 300 avaient accédé à des postes de premier ministre ou de président de leur pays. Des milliers sont devenus des leaders du commerce, des arts et de l’éducation. Plus de 50 lauréats du prix Nobel. Et avoir ce genre de relations, avoir ce genre de liens avec des gens qui continuent de faire des choses aussi merveilleuses pour leurs communautés et leurs pays, c’est un atout considérable pour les États-Unis.
Le programme Mandela Fellowship, pour ne citer que cet élément, travaille avec 26 universités de tous les États-Unis et, dans le cadre de l’expérience de développement professionnel, nous veillons au placement des participants dans 70 organisations privées, publiques et à but non lucratif, ce qui permet de nouer des liens et des relations incroyables, et de former des réseaux qui nous sont bénéfiques, à nous aux États-Unis, à des égards remarquables.
Les bénéficiaires de ce programme ont fait don de plus de 30 000 heures de service à leurs communautés d’accueil et éduqué et ouvert les yeux de ces communautés sur les idées que vous apportez au sujet de la vie dans votre pays. Ce n’est donc pas seulement ce que vous faites par la suite, c’est ce que vous faites lorsque vous êtes aux États-Unis et que vous participez à nos programmes. Et ce que nous faisons aujourd’hui en est un autre bon exemple. Je pense que vous contribuez à mettre en relief vos intérêts, vos objectifs, votre vision de ce que peut être la relation de l’Amérique avec l’Afrique. Et cela va nous aider ici à Washington à prendre des décisions sur les modalités de notre travail avec le réseau YALI lui-même et avec le continent dans son ensemble.
Vous savez, la chose cachée ici, c’est que c’est vraiment un énorme avantage pour nous, c’est un avantage pour moi, et je vous suis vraiment reconnaissant de votre participation, de la participation de tous les boursiers, parce que c’est vraiment, pour moi, l’une des choses les plus productives que nous faisons et nous obtenons sans aucun doute le meilleur retour sur investissement dans ces programmes. Alors, merci.
Bogolo ?
Mme Kenewendo : D’accord. Merci beaucoup, Monsieur le secrétaire. Vous êtes clairement un fervent supporter de ce programme de bourses Mandela et de tous nos programmes YALI, et nous nous en réjouissons.
La question suivante est celle de Wezam, au Nigeria. Wezam ?
- Obanor : Merci, Bogolo. Bonjour, Monsieur le secrétaire d’État. Je m’appelle Wezam. Je suis de la promotion Mandela Washington de 2019, du programme commerce et entrepreneuriat à la Northwestern University.
Ma question est la suivante : compte tenu de l’influence croissante de la Chine en Afrique, les États-Unis seront-ils en concurrence avec la Chine en Afrique, en particulier en ce qui concerne la croissance de l’Afrique au cours des prochaines années ?
Monsieur le secrétaire Blinken : Merci, Wezam. C’est encore une fois une question très importante. Et permettez-moi de dire quelques mots à ce sujet.
Premièrement, l’Afrique, les pays d’Afrique dialogueront et devront collaborer avec un large éventail de partenaires, que ce soit la Chine ou la France, la Turquie ou le Brésil, les États-Unis ou beaucoup d’autres. Et j’espère que les pays africains et les communautés africaines abordent ces relations avec les yeux grands ouverts. La Chine est un concurrent mondial et la concurrence est une bonne chose tant qu’elle est fondamentalement équitable et que les règles du jeu sont les mêmes pour tous. Mais nous avons des approches différentes de la gouvernance, des approches différentes des affaires, des approches différentes de la sécurité. Et les principes fondamentaux de nos partenariats sont parfois assez différents aussi.
Les États-Unis estiment qu’un ordre libre et ouvert, fondé sur des règles, auquel nous adhérons, parfois de manière imparfaite, mais c’est ce à quoi nous souscrivons, est un bon modèle pour que les gens du monde entier réalisent leur plein potentiel. Cela a été le cas pour nous, et nous pensons que cela reste vrai – pas uniquement pour les États-Unis.
En Afrique et dans le reste du monde, nous continuerons, par exemple, de promouvoir l’esprit d’entreprise, des pratiques commerciales équitables, des normes environnementales et sociales saines pour l’aide au développement. Parce que ce que nous devons vraiment voir, où que ce soit, c’est un nivellement par le haut, pas un nivellement par le bas – pour nous assurer que lorsque nous prenons part à des opérations commerciales, à des actions en faveur du développement, des opérations d’aide, nous accordons également une grande attention aux préoccupations environnementales, aux droits des travailleurs, à la transparence, à d’autres aspects vitaux qui conduisent à une croissance et à des opportunités durables et équitables.
Nous allons donc au moins soutenir la bonne gouvernance et des institutions démocratiques fortes ainsi que la transparence de notre aide. Les gens sauront où elle va, ce qu’elle apporte, qui en bénéficie, et ils prendront réellement part à sa mise en œuvre. La transparence est vitale. C’est quelque chose que nous soutenons fortement. Lutter contre la corruption pour faire en sorte que lorsque les pays investissent, lorsque les entreprises s’engagent, cela se fasse sans corruption, car il s’agit de l’une des choses les plus corrosives que l’on puisse imaginer pour la démocratie. Et nous ferons entendre notre voix sur la question des droits de l’homme.
En fin de compte, pour nous, le gouvernement devrait être celui du peuple, par le peuple et pour le peuple, et répondre aux besoins de la population, et ce sont-là des distinctions assez importantes – du moins en ce moment – entre notre vision des choses et celle des autorités de Beijing.
C’est donc une façon détournée de dire que nous ne demandons à personne de choisir entre les États-Unis ou la Chine, mais je vous encourage à poser ces questions difficiles, à ne pas prendre les choses pour argent comptant, à exiger la transparence et à faire des choix éclairés sur ce qui convient le mieux pour vous et vos pays. Si quelqu’un vient et dit : « Je vais investir beaucoup d’argent dans votre pays, mais c’est un prêt, donc cela signifie que vous avez une dette, et vous devrez la rembourser un jour, et si cette dette est trop élevée et que vous ne pouvez pas la rembourser, alors je vais devenir propriétaire de l’actif en question », eh bien, vous devriez y regarder de plus près. Parce que contracter trop de dettes devient un fardeau insoutenable pour les pays, qui sont ensuite confrontés à un choix incroyablement difficile : soit les rembourser, et probablement le faire d’une manière qui prive la population de ressources, soit remettre l’investissement à celui qui l’a fait et qui est propriétaire de la dette. Vous devez vous demander si les pays qui viennent construire un grand projet d’infrastructure font venir leurs propres ouvriers ou s’ils donnent des emplois à la population du pays où ils investissent. Quelles sont les normes environnementales ? Quelles sont les normes pour les ouvriers qui travaillent sur ces projets et quels sont leurs droits ? Y a-t-il une transparence quant à la destination de l’argent ? Il est important de se pencher sur toutes ces questions, et quiconque effectue un investissement doit être tenu de respecter des normes très strictes.
Nous allons donc, pour notre part, rester axés sur l’Afrique. Nous croyons en l’Afrique. Nous croyons en son potentiel extraordinaire. Nous pensons que c’est nécessaire parce que lorsque vous avez une proportion aussi énorme de la population mondiale en Afrique, et qu’elle ne fait que croître, tout le monde a intérêt à la croissance et la réussite de l’Afrique parce qu’elle apportera une contribution au monde, pas seulement à l’Afrique. Votre succès est le nôtre, et nous voulons y investir mais en faisant bien les choses.
Bogolo ?
Mme Kenewendo : Très bien. Nous avons presque terminé la série de dix questions, Monsieur le secrétaire, sans que celle-ci ne soit soulevée. Mais j’aurais été surprise qu’elle ne soit pas posée parce qu’avant la COVID, tout le monde parlait des relations entre les États-Unis et la Chine et de leur impact sur l’Afrique, et maintenant tout tourne autour de la diplomatie de la COVID et de ce que nous allons faire à l’avenir.
Je tiens donc à remercier Edwige d’avoir soulevé cette question, une question très pertinente. Et pour conclure nos « 10 questions avec Tony », nous serons – désolée, donc pour conclure, ce sera en fait Edwige, de la Côte d’Ivoire.
Mme Dro : Merci, Bogolo. Bonjour, Monsieur le secrétaire d’État. Je m’appelle Edwige Dro et je suis de la promotion Mandela Washington de 2019. J’ai suivi le cursus sur l’engagement civique de l’université du Delaware. Je suis écrivaine et activiste littéraire et j’ai toujours été fascinée par la manière dont les artistes, de la Renaissance de Harlem à Hollywood, ont façonné les contenus narratifs des États-Unis.
Alors, à quelle collaboration peut-on s’attendre sous l’administration Biden entre les écrivains et artistes africains et leurs collègues américains ?
Monsieur le secrétaire Blinken : Eh bien, merci. C’est une excellente question sur laquelle terminer, car c’est aussi quelque chose qui me tient à cœur.
J’observe depuis de très nombreuses années, et j’ai vu de près, l’incroyable pouvoir de la diplomatie et des échanges culturels. L’une des plus grandes exportations des États-Unis est notre diplomatie culturelle, mais c’est aussi l’une de nos plus importantes importations. Et mettre en contact des citoyens américains d’horizons divers – écrivains, artistes, personnalités d’affaires, étudiants – avec leurs homologues africains a pour effet de créer un creuset incroyablement puissant et fertile pour l’expression culturelle, l’innovation culturelle, les idées culturelles. Et je pense que les écrivains et les artistes comme vous jouent un rôle très important dans l’avancement des arts, par la culture, par ces liens qui connectent les gens de la manière la plus profonde possible, qui transcendent la politique et qui transcendent certaines des questions, les questions géopolitiques dont nous parlons – c’est si vital pour faire progresser la démocratie et le changement social. Et cet échange d’idées ouvert et dynamique, en particulier à travers l’expression culturelle, plus que toute autre chose, je pense, unit et lie les gens entre eux de manière propice parfois à la résilience face à d’autres défis auxquels nous sommes confrontés dans les relations entre les pays.
Le programme des écrivains de l’Iowa – et je comprends que c’est quelque chose auquel vous allez participer, c’est un programme remarquable, alors félicitations – et One Beat and Arts Envoys, nous avons toute une gamme de programmes que nous travaillons à soutenir, à faciliter au département d’État. Et certains des moments qui resteront avec moi et qui sont les plus évocateurs pour moi sont des échanges avec des participants à des programmes d’échanges culturels pour voir le travail qu’ils font, leur expression de ces émotions humaines que nous partageons, d’où que nous venions, quelle que soit notre histoire. Il est difficile de penser à quelque chose qui unisse mieux les gens à un moment où ces liens, je pense, sont plus importants que jamais.
Donc, merci pour ce que vous faites. Merci pour votre propre engagement et bonne chance avec le programme des écrivains. C’est assez remarquable. Et j’ai hâte de vous lire un jour.
Bogolo ?
Mme Kenewendo : Très bien, formidable. Merci beaucoup, Edwige, pour cette question, et merci beaucoup, Monsieur le secrétaire. Ainsi se termine notre série de « 10 questions avec Tony », et Monsieur le secrétaire, je tiens simplement à souligner que l’on m’a demandé plusieurs fois mon avis dans différents forums sur la manière dont les États-Unis peuvent renouer le dialogue avec l’Afrique et redynamiser nos relations. Et je dis souvent que les jeunes sont prêts, ils sont motivés, et c’est là que le dialogue doit commencer, mais il doit aussi être à la hauteur des ambitions du continent – les ambitions en matière de commerce et d’investissement, comme les questions soulevées l’ont montré, les ambitions en matière d’autonomisation des jeunes femmes et des femmes en général, des ambitions en matière de préparation au leadership pour assumer la place qui nous revient à la table des discussions, des ambitions en matière d’arts et de culture, de démocratie, de paix et de stabilité.
Il s’agit là de domaines qui suscitent tous chez nous une grande passion et nous avons tracé des voies qui définissent les modalités de l’engagement que nous entendons mettre en œuvre, et nous sommes prêts pour des partenaires qui sont disposés à aller de l’avant avec nous. Et ce qui ressort aussi du dialogue d’aujourd’hui, Monsieur le secrétaire, c’est que tous ici disent être non pas les leaders de demain, mais les leaders d’aujourd’hui, parce que chaque jour ils travaillent d’arrache-pied pour faire en sorte d’avoir un avenir et quelque chose à léguer à la prochaine génération. Je suis donc très heureuse qu’au plus haut niveau de votre bureau vous ayez choisi de parler avec nous aujourd’hui. Vous avez choisi, même en pleine pandémie et face à une crise aux États-Unis, de dialoguer avec de jeunes leaders africains. Et comme vous l’avez dit, nous devons redoubler d’efforts, et je crois que tout le monde est prêt à relever ce défi.
Et je voudrais juste vous demander, vous accorder ce moment, si vous avez quelques mots de conclusion pour nous, des derniers mots, des points à retenir de notre conversation avec vous.
Monsieur le secrétaire Blinken : Eh bien, Bogolo, il est vraiment très difficile de prendre la suite de vos propos d’une telle éloquence, parce que vous avez si bien parlé, et je suis tout à fait d’accord avec tout ce que vous venez de dire.
Je dirai simplement que pour moi, cette conversation, bien qu’elle soit virtuelle et que le temps qui nous est imparti soit malheureusement un peu limité, est tout simplement stimulante et positive à un point incroyable. J’apprends énormément à votre écoute et vous êtes pour moi une source d’inspiration considérable. Bogolo, pour revenir à votre propos, je pense que c’est la démonstration parfaite que nous ne parlons pas seulement des dirigeants de demain, nous parlons des dirigeants d’aujourd’hui. Et ce que chacun de vous fait dans sa vie, avec sa vie, de sa vie, c’est du leadership et cela va être une source d’inspiration, comme je l’ai dit un peu plus tôt, pour les gens d’une manière que vous ne pouvez même pas imaginer. Et le progrès, c’est ça, c’est ce genre d’exemple, ce genre d’inspiration et ce genre d’engagement.
Je tiens donc à vous remercier à la fois pour les questions importantes et les bonnes idées que j’ai entendues aujourd’hui sur la façon dont nous pouvons rendre ce programme encore plus fort à l’avenir, mais surtout vous remercier de votre mobilisation, de votre engagement, de l’exemple que vous donnez, d travail que vous faites. Cela me donne une immense confiance en l’avenir. Et je sais qu’il y a tellement de choses difficiles auxquelles le monde est confronté, auxquelles nous devons tous faire face, que beaucoup d’entre vous doivent affronter dans leur propre vie. Mais réfléchissez simplement un moment au fait que ce que vous faites a un impact, et ça, plus que toute autre chose, c’est la confiance en l’avenir. Alors, merci.
Mme Kenewendo : Merci, Monsieur le secrétaire. Permettez-moi de clore cette session en me présentant. Je suis Bogolo Kenewendo, du Botswana, et une ancienne du Forum de la Première dame des jeunes leaders africaines de 2011. J’ai écouté tout le monde ici. Je pense que j’ai plus d’ancienneté que tous sur le plan de la participation à YALI. Cela a donc été un plaisir absolu d’être avec vous cet après-midi, ce matin pour vous, et je crois que je parle au nom de tous les anciens participants ici aujourd’hui et avec nous en ligne lorsque je vous dis merci et nous nous réjouissons à la perspective d’autres échanges avec vous et votre département, et les États-Unis en général, sur la façon dont nous pouvons continuer à renforcer, renouveler et revigorer nos relations entre les États-Unis et l’Afrique.
Monsieur le secrétaire Blinken : Merci. Merci à tous.
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